Pendant longtemps, l'alternance a souffert d'une mauvaise image, celle de "formation de bas niveau de qualification, préparant pour l'essentiel à des métiers manuels". Souvent perçue comme une "voie de garage", cette vision ne correspond plus du tout à la réalité du paysage éducatif français.
Aujourd'hui, l'alternance dans l'enseignement supérieur est une voie de formation exigeante et d'excellence qui permet d'accéder jusqu'au plus haut niveau de qualification. Il s'agit d'un mode de formation par alternance qui confère à l'étudiant un double statut : à la fois étudiant et salarié d’entreprise.
La croissance et la performance de l'alternance dans le supérieur contredisent largement cette idée selon laquelle l'alternance serait une filière sans avenir. Les données récentes témoignent d'une professionnalisation massive des cursus postbac :
L'alternance est loin d'être un phénomène marginal dans le supérieur :
• Près de 40 % des alternants sont désormais inscrits dans l’enseignement supérieur.
• Les estimations pour juin 2025 (tous niveaux, y compris secondaire) sont de 986 500 contrats d’apprentissage actifs, dont plus de 60 % dans le supérieur.
• L'offre de formation est vaste, avec plus de 10 000 diplômes et titres accessibles par cette voie
• On note une féminisation notable, avec plus de 45 % de femmes dans les formations en alternance du supérieur.
Le succès de ce modèle se mesure surtout à la sortie du diplôme. L'alternance est spécifiquement conçu en lien étroit avec les besoins des milieux professionnels, ce qui garantit une employabilité renforcée :
• Le taux d’insertion des jeunes atteint 80 % six mois après l’obtention de leur diplôme en apprentissage.
• Les diplômés de l’alternance sont souvent recrutés à un niveau de salaire supérieur à leurs homologues issus du cursus classique, car ils sont considérés comme ayant déjà plusieurs années d'expérience professionnelle.
L'engagement est fort, à la fois du côté de l'alternant et de l'employeur. Cela se traduit par une grande stabilité contractuelle :
• Le taux de rupture sur les contrats dans l’enseignement supérieur est extrêmement faible, s'élevant de l'ordre de 3%.
Depuis la loi Seguin de 1987, qui a ouvert l'alternance dans l’enseignement supérieur, cette voie s'est étendue à tous les niveaux de qualification.
L'alternance permet de valider exactement les mêmes diplômes que ceux préparés par les étudiants en formation initiale classique. L'alternance n'est donc plus réservée aux CAP ou BAC Pro, mais couvre l'intégralité du cursus supérieur :
• Il est possible de réaliser tout son cursus, du BAC+2 au BAC+5 par alternance.
• Cela inclut les brevets de technicien supérieur (BTS), les diplômes universitaires de technologie (DUT), les licences, les licences professionnelles, les masters, les diplômes d'ingénieur ou d'écoles de commerce, mais aussi des diplômes d'état (comme infirmier ou œnologue).
L’offre de formation est nationale et pluridisciplinaire, couvrant tous les grands domaines. L'alternant peut ainsi se former aux métiers de demain sur des fonctions de technicien supérieur, de cadre, de chargé de projet ou d'ingénieur dans des secteurs variés tels que :
• Les sciences et technologies, la santé, le droit, l’économie et la gestion, les sciences humaines et sociales, les arts, les lettres et les langues.
• L’agroalimentaire, l’aéronautique, l’industrie, l’informatique, le commerce, le management, la comptabilité, les ressources humaines, la logistique et le transport.
L’alternance repose sur l’articulation entre des périodes en entreprise et des périodes en centre de formation. Elle se concrétise sous deux formes principales :
○ Pour qui ?
Principalement les jeunes de 16 à 29 ans (avec quelques exceptions pour aller au-delà).
○ Chez qui ?
Dans pratiquement toutes les structures : entreprises privées, associations, professions libérales, administrations publiques (État, collectivités, hôpitaux) ou encore grands établissements comme la SNCF ou EDF.
○ Pourquoi ?
Pour préparer un diplôme ou un titre professionnel reconnu (du CAP au Master).
○ Durée : entre 6 mois et 3 ans (jusqu’à 4 ans dans certains cas).
○ Organisation : entre 25 % et 50 % du temps est passé en formation (CFA).
○ Salaire : dépend de ton âge et de ton avancement dans le cursus : entre 27 % et 100 % du SMIC (ou du minimum prévu par la convention collective si plus favorable).
💡Bon à savoir
L'apprentissage est la voie “classique” de l’alternance, faite pour obtenir un diplôme tout en gagnant de l’expérience.
🔹 Le contrat de professionnalisation
• Pour qui ?
○ Les jeunes de 16 à 25 ans qui veulent compléter leur formation.
○ Les adultes de 26 ans et plus en recherche d’emploi.
○ Les personnes bénéficiant de certains minima sociaux (RSA, ASS, AAH…).
• Chez qui ?
Dans les entreprises privées, les associations et les établissements publics industriels et commerciaux (hors administrations classiques).
• Pourquoi ?
Pour se former rapidement à un métier et favoriser l’insertion professionnelle. Cela peut déboucher sur un diplôme, mais ce n’est pas systématique.
• Durée : généralement de 6 à 12 mois, parfois jusqu’à 24 mois.
• Organisation : au moins 150 heures de formation par an, soit en moyenne 15 % à 25 % du temps du contrat.
• Salaire : dépend de l’âge et du niveau d’études initial : entre 55 % et 100 % du SMIC (ou du minimum conventionnel si plus favorable).
💡Bon à savoir
La professionnalisation est pensée pour une entrée rapide sur le marché du travail, souvent pour des adultes ou des jeunes qui veulent se spécialiser.
L'alternant, en tant que salarié, bénéficie de plusieurs leviers d'excellence et d'indépendance :
• Gratuité de la formation : la formation est gratuite (hors contribution à la vie étudiante et de campus, CVEC), les frais de scolarité étant pris en charge par l'établissement de formation.
• Rémunération : il touche une rémunération mensuelle sur toute la durée du contrat. Cette rémunération est fixée par une grille salariale réglementaire, dépendant de l'âge et de l'année de formation, et peut aller de 27 à 100 % du SMIC au minimum.
• Avantage fiscal : il bénéficie d’une exonération totale des charges salariales dans la limite de 79 % du SMIC, garantissant que le salaire net est égal au salaire brut.
• Statut social : il bénéficie d’une couverture sociale au même titre que tout salarié et a accès aux mêmes droits que les autres étudiants (installations sportives, restaurants universitaires).
• Expérience métier : le contrat permet d’acquérir une réelle expérience professionnelle à valoriser, et l'alternant est souvent amené à traiter des dossiers dans leur totalité, développant ainsi son sens de l’autonomie.
Pour l'entreprise, le recrutement d'alternants est un outil stratégique :
• Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) : le recrutement d’alternants s’inscrit dans une réelle GPEC, permettant le renouvellement des compétences et d'anticiper les besoins futurs.
• Pré-embauche : le recrutement d'un alternant est un investissement sur du long terme, constituant souvent une véritable phase de pré-embauche. Le contrat d'alternance est perçu comme une "formidable période d'essai".
• Transmission culturelle : les alternants sont formés précisément à la culture de l’entreprise, à ses métiers, services et produits.
• Innovation : les alternants apportent un regard neuf et des connaissances théoriques liées à la formation universitaire, stimulant ainsi l'innovation au sein de l'entreprise.
La qualité de parcours en alternance est garantie par un encadrement structuré, centralisé par le centre de formation d'apprentis (CFA).
Le CFA est le pivot de la formation par alternance. Il travaille en lien étroit avec les établissements d'enseignement supérieur (universités, grandes écoles).
• Le CFA assure le lien avec les organismes qui financent les formations, avec les entreprises et avec les établissements d’enseignement supérieur.
• Il accompagne les candidats et les alternants tout au long de leur contrat.
• Les CFA de l’enseignement supérieur sont fédérés dans l’association ANASUP, qui permet les échanges de bonnes pratiques et sert d'interlocuteur des pouvoirs publics en matière d’apprentissage dans le supérieur.
L’un des points forts de l'alternance est d’avoir un suivi permanent par deux personnes référentes :
• Le maître d’apprentissage (en entreprise) : son rôle essentiel est d'intégrer l'alternant, de l’accompagner dans ses missions, de lui transmettre son savoir-faire et de lui apporter des méthodes de travail.
• Le tuteur académique (au centre de formation) : son rôle est d’assurer l’acquisition des connaissances théoriques et de s’assurer que le travail réalisé en entreprise est bien en adéquation avec la mission convenue et le diplôme préparé. Le tuteur pédagogique est là pour suivre les résultats scolaires de l'apprenti et l'aider à trouver des solutions en cas de difficultés.
Ce double suivi est considéré comme idéal et rassurant, car il crée le lien entre les études théoriques et le réel de l’entreprise. Les échanges réguliers se font lors d’entretiens ou au moyen du carnet de liaison ou d'outils numériques appelés livrets électroniques de l'apprentissage (LÉA).
Si l'alternance est une voie d'excellence, elle n'en est pas moins exigeante. L'alternant doit être capable de gérer les allers-retours entre la formation et le lieu de travail, autrement dit d'organiser une "double vie"!
L'alternance impose un rythme de travail soutenu. L'un des défis majeurs pour l'alternant est de jongler entre ses obligations de salarié (comportement professionnel, obligation de résultat) et ses obligations d'étudiant.
• Son temps de travail est identique à celui des autres salariés de l'entreprise (généralement 35 h/semaine). Il a l'obligation d'être présent durant les périodes de cours, qui sont comprises dans le temps de travail effectif et rémunérées.
• Il ne bénéficie plus des congés universitaires, mais uniquement des cinq semaines de congés payés en entreprise.
• Le rythme d’alternance (qui varie, ex. : une semaine/une semaine, deux jours/trois jours, ou un mois/un mois) peut générer du stress et demande une excellente organisation.
• L'alternance peut parfois impliquer un éloignement entre le lieu de formation et l’entreprise, ce qui entraîne des frais liés au double logement et au transport. Ce coût important n'est pas toujours couvert par le salaire.
Malgré ces difficultés, l'expérience en entreprise apporte un gain considérable. La gestion de cette double vie permet à l'alternant d’acquérir de la maturité et de développer rapidement sa capacité à s'adapter à toutes situations de travail.
Comme le souligne un directeur des Ressources humaines, l'alternance est "un accélérateur d'expérience dans le monde de l'entreprise". C'est une formidable expérience qui permet de gagner du temps et qui constitue un énorme atout pour une insertion professionnelle aisée.
En somme, l'alternance dans le supérieur est aujourd'hui une relation gagnant-gagnant pour l'alternant, l’employeur et l’établissement de formation.
C'est une formation exigeante, mais qui permet de prendre de l'avance dans sa carrière et de décrocher un diplôme d’excellence avec une expérience concrète.